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Le Blog de Joël Dimitri Vihoundjè "Le Citoyen Engagé"
16 avril 2012

RÉVISION DE LA CONSTITUTION : « PAS SANS DEBAT »

RIC« On fait appel à des experts étrangers comme si nous étions incompétents »
Interview avec le professeur Maurice Glèlè Ahanhanzo sur l’émission libertatis diffusée le 25 août 2011 sur Radio Immaculée Conception,
Transcription : Alain SESSOU
Réviser la Constitution du 11 décembre 1990 est l’une des principales réformes inscrites au programme de refondation du président Boni Yayi. Dès 2008, il a mis en place une commission nationale de relecture, présidée par le professeur Maurice Glèlè Ahanhanzo. Au terme de ses travaux, le 31 décembre 2008 la commission a remis au chef de l’Etat le texte modifié. En 2011, le débat sur la révision de la constitution est relancé. Le texte soumis à l’Assemblée est bien différent de celui de la Commission. Sur Radio Immaculée Conception, le professeur lève un coin de voile sur les manœuvres de la révision de la Constitution.
Radio Immaculée Conception : Professeur, y a-t-il un secret autour de la révision de la Constitution ? Qu’est-ce que vous nous cachez dans cette entreprise de révision ? En clair, qu’avez-vous révisé ?

Maurice Glèlè Ahanhanzo : Nous avons modifié deux ou trois points pour rendre le texte plus fonctionnel. Mais le commanditaire qui est le gouvernement a changé un certain nombre de points et a envoyé directement le texte à l’Assemblée nationale.

Vous n’avez plus été informé par la suite?
C’est le moment de le dire. C’est une question de respect, de courtoisie. On nous confie un texte à travailler. Nous l’avons fait. Après le chef de l’Etat envoie le texte à l’Assemblée… Et c’est par des amis de l’Assemblée que j’ai pu obtenir ce texte envoyé aux députés.

Et le texte est différent du vôtre ?
Celui qui a commandé a fait ce qu’il veut. Mais la moindre courtoisie est qu’on nous donne la version envoyée à l’Assemblée tout au moins à titre informatif. C’est cette considération qu’on ne nous a pas reconnue. Peu importe. Les dirigeants l’ont fait. Quand je l’ai su après, j’ai tout simplement dit que c’est dommage. Mais il faut qu’on en discute, que l’Assemblée nationale en discute. Il faut que le texte soit discuté par toute la population.
Or maintenant, ils ont fait appel à des experts étrangers qui sont en train de refaire la Constitution au jour d’aujourd’hui. Comme si nous étions incompétents…

Pour clarifier votre position, pouvez-vous nous dire quelles sont les grandes réformes que vous avez opérées ?
Il ne faut pas se presser. Au Bénin, on sait ce que vaut le secret. Notre texte est déposé devant l’Assemblée depuis 2009. Jusqu’à présent, à notre connaissance, ce texte n’est pas retiré. Les journaux, très vigilants, pourraient même nous sortir ce qui est prévu. Et nous allons exiger qu’il y ait discussion de ce texte-là. Mais on est en train d’en faire un autre avec des experts étrangers.

Qui sont des experts que vous connaissez ?
Je suis dans le secteur. Il y a des gens avec qui j’ai passé le concours d’agrégation. Ce n’est pas grave. Ils n’ont qu’à le faire. La chance que nous avons, c’est que nous connaissons notre pays. Ce n’est plus le lendemain de l’indépendance où nous ignorions les questions constitutionnelles. En ce moment-là, ce sont eux qui sont venus rédiger une Constitution pour les pays du Conseil de l’entente. Et après, chaque pays a changé. Donc, je ne pense pas qu’en 2011, on puisse aller chercher des gens à l’extérieur. C’est un mépris de la population. Ils (les dirigeants, Ndr) n’ont pas de respect ni de considération pour leurs citoyens. Nous connaissons les problèmes du Bénin. Aucun expert international ne connaît nos problèmes aussi bien que nous-mêmes. Je disais, pas plus tard qu’hier, à ceux qui nous aident : aidez-nous à mettre au point la Lépi parce qu’il y a des incongruités dedans et des insatisfactions. Puis après ça, laissez-nous gérer nos affaires. Il y a les cadres qu’il faut. Nous sommes un pays de culture. Alors pourquoi en 2011, nos dirigeants ont la faiblesse de recourir à des experts internationaux dans ce domaine ? Allez à l’Université. Il y a des gens valables. Il faut que ce soient les Béninois qui s’occupent de leurs institutions.

Pour terminer, vous avez dit que vous aimez que l’on parle, que l’on discute. Mais je fais personnellement le constat que les Béninois ne parlent plus. Ils se taisent, ils observent. Ils acceptent. C’est comme la période d’avant conférence nationale. Je me demande si vous avez un regard par rapport à ça ?
Nous avons fait des élections avec Lépi et tout ce qu’il y a eu. Il y a eu beaucoup de frustrations. Je l’ai déjà dit. Ceux qui ont gagné ne se réjouissent pas trop. Ils ne sont pas sûrs d’eux-mêmes. Ceux qui ont perdu ont protesté un peu. Et ne se plaignent plus. Quel est ce pays où personne ne parle ? J’estime que c’est dangereux pour notre pays. Il vaut mieux que les gens discutent. Qu’on les laisse parler. Qu’ils échangent et se défoulent. Sinon je crains toutes les réformes, tous les slogans. Je ne sais pas comment on refonde la République. Le président parle de la refondation. C’est quoi ? Est-ce un réarmement moral ? La vertu politique, comme le dit Montesquieu dans l’Esprit des lois ? Pourquoi avons-nous perdu l’amour de la patrie ? Pourquoi avons-nous perdu le sens du bien commun ? Le président lui-même dit que nous avons perdu les valeurs. Mais il y a des spécialistes en la matière. Même les jeunes de l’Université. Il faut prendre les meilleurs parmi eux pour qu’ils travaillent sur ces thèmes.
Quand le Béninois ne parle pas, il est engourdi. Et c’est grave. Les grèves, les échecs scolaires sont autant de problèmes sérieux. On doit parler librement. Qu’on soit de l’opposition ou de la mouvance, on doit parler ensemble de ces problèmes. Au Bénin, quand les gens sont mécontents et qu’ils ne parlent pas, chacun vit de son côté. Pendant ce temps, par expérience, il y a des choses qui se trament en dessous. Et un jour il y aura implosion. Il faut l’éviter. Il faut qu’on discute, qu’on ait les documents des réformes institutionnelles. Qu’on en parle dans nos langues.
Les mouvements de communication nous envahissent partout. Quelque chose se passe à l’autre bout du monde, et cinq minutes après, vous êtes au courant. Ca donne des idées aux gens. Ils réfléchissent. Donc il faut laisser les gens parler. Il faut même les inciter à parler à échanger. Le silence n’est pas bon. C’est un danger que je crains pour notre pays. Il faut que l’on puisse dire calmement ce que l’on veut et ce que l’on estime mauvais. J’estime que le gouvernement ne peut pas tout faire. Il faut que le citoyen se prenne en charge. Qu’il discute pour dire : on veut ceci, on veut cela. Et qu’ensuite le gouvernement et les députés réagissent. Je veux dire à nos amis députés qui sont les représentants de la Nation, qu’ils doivent avoir le courage de prendre des lois qu’il faut. Vous savez, je ne veux pas faire de subversion. Si vous prenez la constitution, il y a au moins une vingtaine de lois qui devaient être prises pour l’application de cette constitution depuis 1990. Combien de ces lois ont été prises ?

  

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